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 15 questions réponses sur la dépression

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mariamélie
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mariamélie


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MessageSujet: 15 questions réponses sur la dépression   15 questions réponses sur la dépression EmptyJeu 28 Fév 2008 - 3:58

Article tiré du dernier numéro de Science et Avenir.

15 questions réponses sur la dépression Cover3


15 questions pour vivre mieux


En 2005, 8% des Français ont connu un épisode dépressif. Eclairage sur cette maladie qui reste stigmatisante car mal connue.

1. Comment reconnaître une dépression ?

Il n'y a pas une dépression, mais plusieurs, très différentes les unes des autres.

La classification psychiatrique américaine, très utilisée dans le monde, le DSM IV (1), distingue au sein de ce que l'on appelle les troubles de l'humeur des pathologies allant de la dysthymie, c'est-à-dire des épisodes peu sévères, à l'épisode dépressif majeur (EDM), en passant par la dépression hivernale, celle du post-partum ou encore la mélancolie profonde et bien d'autres... Chez l'adulte, l'EDM typique associe de multiples signes comme l'anxiété, la tristesse, le ralentissement, l'inhibition, la perte à la fois de l'envie et du plaisir à faire les choses. Sans oublier les troubles du sommeil - réveil précoce à 4 heures du matin -, de l'appétit - anorexie ou boulimie -, les douleurs diffuses, la fatigue, les troubles sexuels. En fait, le diagnostic est parfois difficile car les masques pris par la dépression sont multiples. «On retrouve souvent une triade de pensées négatives et de pessimisme portant sur soi-même, les autres et l'avenir», précise le Dr Charles Cungi, psychiatre à Rumilly (Haute-Savoie).

Chez l'enfant et l'adolescent, les «je m'en fous», «je suis nul», «j'y arrive pas» et «c'est de ma faute» traduisent respectivement une perte d'intérêt et de plaisir à faire les choses, une dévalorisation, un sentiment d'impuissance et un sentiment de honte. Chez le tout-petit, pleurs fréquents, agitation ou au contraire apathie et indifférence au monde sont des signes d'alarme.


2. Comment faire la différence entre dépression et simple passage à vide ?

La dépression est avant tout une maladie qui dure. Où l'on s'enfonce progressivement. Les symptômes s'installent sur plus de quinze jours, deviennent journaliers, ont un impact sur la vie quotidienne, le travail, les relations avec l'entourage.

«Dans les cas de tristesse passagère, les symptômes sont spontanément réversibles et moins envahissants», précise le Pr Henri Loo, responsable du service de psychiatrie à l'hôpital Sainte-Anne de Paris.


3. Sommes-nous tous égaux face à cette pathologie ?

«Non, répond le Pr Loo. Certains sont fragilisés par une prédisposition génétique, comme le montre l'étude des arbres généalogiques des dépressifs. Entrent aussi en compte des événements douloureux survenus durant l'enfance, tout particulièrement des séparations précoces avec la mère... Elles sont à l 'origine de cicatrices affectives qui peuvent être rouvertes lors de nouvelles expériences traumatiques à l'âge adulte, comme un deuil, une maladie, une séparation. Les spécialistes s'accordent aujourd'hui sur le scénario suivant : un événement vient favoriser une dépression déjà préparée.» Autre signe d'une inégalité face à la dépression : 30% des patients sont résistants aux traitements. Enfin, une équipe CNRS de l'université de Nice a réussi à créer, en 2007, des souris génétiquement modifiées totalement résistantes à la dépression.




4. Qui est concerné ?

On sait que les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes, et que tous les âges sont concernés. Exceptionnelle chez le nourrisson, la dépression survient chez 1% des enfants de moins de 6 ans, 3 à 5% des 6-10 ans et des adolescents. A savoir : elle est fréquente (15%) et souvent sous-estimée chez les personnes âgées. Sur toute une vie, on estime que près d'un Français sur cinq (9 millions de personnes entre 15 et 75 ans) a vécu ou vivra une dépression. Selon une enquête réalisée en 2005 par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes), cette année-là, 8% des Français (3 millions de personnes) ont connu un épisode dépressif... Ce qui signifie tout de même aussi que 92% d'entre nous n'ont pas été concernés !


5. Que peut-on faire par soi-même ?

D'abord, accepter de parler de sa souffrance. Il faut savoir que la dépression est une cause importante de suicide : selon l'Inpes, 70% des personnes qui décèdent par suicide souffraient d'une dépression. Ensuite, «ne pas rester seul, renchérit le Dr Cungi, et maintenir si possible une
activité professionnelle, physique et intellectuelle. Enfin, appliquer au quotidien la règle de la demi-performance, pour ne pas mettre la barre trop haut».


6. Faut-il consulter ?

Oui. Sans hésiter.
Pas forcément en venant chercher une ordonnance mais pour parler.
«Toutefois, la démarche est encore taboue, la maladie restant stigmatisante car un peu honteuse», note le Dr Cungi. A chacun de choisir son interlocuteur, un médecin généraliste, un psychiatre, un psychologue ... Les consultations de psychologues dans le privé ne sont pas remboursées mais certaines assurances complémentaires proposent une prise en charge partielle d'au moins un certain nombre de séances.


7. Maniaco-dépressif, ça veut dire quoi ?

Ce qu'on appelait autrefois «psychose maniaco-dépressive» a été rebaptisé «troubles bipolaires» (TB). Ces troubles se caractérisent par des accès dépressifs alternant avec des phases dites maniaques, où l'humeur est, à l'inverse de la dépression, très euphorique. Le diagnostic des TB est difficile. Il est posé, en moyenne, après huit ans d'évolution.

Longtemps, on a traité les TB comme une dépression. Or, non seulement c'est une affection différente, mais certains antidépresseurs peuvent favoriser le passage aux accès maniaques. Le traitement le plus adapté repose surtout sur le lithium, parfois en association avec des antidépresseurs, certains antiépileptiques et un accompagnement psychothérapeutique. En France, 500 000 personnes, 1% des plus de 15 ans, seraient concernées. «Mais attention aussi aux diagnostics de TB par excès, commente le Dr Francis Paumier, psychiatre à Nantes, car comment ne pas être catalogué de bipolaire si un médecin interprète mal le moindre cheveu qui dépasse dans un comportement !»


8. Peut-on soigner médicalement une dépression ?

«Oui. Mais il faut savoir qu'environ 50% des dépressions ne sont pas traitées et qu'une dépression sur deux est traitée selon des posologies et des doses insuffisantes», détaille le Pr Loo.

Tout repose sur le soutien psychologique et les médicaments, plus ou moins associés selon les cas. Environ 70% des déprimés répondent aux traitements antidépresseurs quand ils sont à la fois correctement prescrits et bien pris, soit pendant au moins six mois. «Il est essentiel de ne pas interrompre trop tôt le traitement, car c'est un facteur de rechute», insiste le Pr Loo. De plus, quel que soit l'antidépresseur, il faut attendre environ trois semaines, un délai d'action incompressible, pour qu'une amélioration se fasse sentir. En cas d'échec des traitements, 30% des cas, il est toujours possible de changer de molécule ou d'en associer plusieurs. Dernier recours, les électrochocs. Longtemps controversés mais aujourd'hui bien mieux maîtrisés (voir Sciences et Avenir n° 709, mars 2006), ils sont efficaces dans 80% des cas. Vient ensuite la stimulation magnétique transcrânienne (lire notre reportage p. 60) et bientôt peut-être la stimulation cérébrale profonde (lire l'encadré p. 61).


9. Quelles sont les prises en charge psychologiques ?

On distingue les thérapies comportementales cognitives, dites TCC, plutôt rapides, et les psychothérapies d'inspiration analytique, plus longues, plutôt proposées à distance de l'épisode dépressif. Les TCC ne visent pas à modifier en profondeur l'ensemble d'une personnalité. Elles ont pour but, en quelques séances, de modifier le comportement qui gâche la vie de la personne déprimée. On les oppose souvent à l'approche psychanalytique, plus en profondeur, qui elle s'intéresse à l'inconscient et à la petite enfance.


10. Peut-on se passer d'antidépresseurs ?

Tout dépend de la gravité. Dans le cas d'une dépression légère, une psychothérapie peut suffire. Si elle est plus intense, «on sait que l'absence de traitement conduit à une rechute à un an dans 80% des cas. Avec antidépresseur et psychothérapie, ce taux chute à 24%», répond le Dr Cungi. Quant au Pr Loo, il nuance : «Je répondrais qu'on peut se passer d'antidépresseurs, parfois, et dans certains cas. Mais je dirais aussi qu'il ne faut pas le faire, car c'est priver les déprimés d'une véritable arme thérapeutique.»

On sait, depuis 1996 et le rapport du Pr Edouard Zarifian, que la consommation de médicaments psychotropes (voir le lexique p. 59) est très forte en France. «Pour les antidépresseurs, tout se passe comme si les personnes qui en ont objectivement besoin n'y ont pas accès car elles ne consultent pas; tandis que d'autres qui pourraient, elles, s'en passer, se retrouvent avec des prescriptions inutiles», résume le Dr Marc Weill, psychiatre à l'hôpital Tenon à Paris.


11. Les antidépresseurs rendent-ils «accro» ?

«Non, répond, formel, le professeur Loo. Mais dans l'esprit du grand public, il y a une véritable confusion entre les antidépresseurs et les benzodiazépines qui sont elles des anxiolytiques, c'est-à-dire traitant l'anxiété. Pour ces dernières, la dépendance est bien connue. En ce qui concerne les antidépresseurs, il peut y avoir une dépendance psychologique, mais en aucun cas pharmacologique.»


12. Que peut dire l'entourage ?

«Avant de dire quoi que ce soit, il faut comprendre qu'il s'agit d'une maladie et que tout échappe au déprimé», précise le Dr Cungi. Ensuite, il faut parler, assurer le malade de son soutien «et ne pas hésiter à être directif à prendre rendez-vous pour lui avec un médecin, et même à l'accompagner à la première consultation», poursuit le Pr Loo. Et surtout oser poser la question de la présence ou non d'idées suicidaires. Des enquêtes ont montré que 60 à 70% des suicidants ont consulté un médecin généraliste dans le mois qui précède leur geste autodestructeur. Enfin, ne pas oublier que côtoyer un déprimé constitue sur le long terme une épreuve pour l'entourage. Et qu'on peut se faire aider afin d'éviter l'épuisement émotionnel.


13. Est-ce que la volonté de s'en sortir peut suffire ?

Absolument pas. Et contrairement à une idée reçue encore fortement ancrée, le «remue-toi» est à proscrire. «Il est fallacieux, voire honteux de parler de volonté à un dépressif. Les capacités d'initiative, de décision et d'action des déprimés sont paralysées (lire p. 48). Demanderiez-vous à un paralytique de marcher ? interroge le Pr Loo. Le «bouge-toi» fait justement appel à ce qui est mort chez ces personnes. L'entourage croit bien faire mais la formule est maladroite. De plus, le déprimé a honte de son état, il culpabilise, et cette invitation réactive sa honte et sa culpabilité.» En fait, «les déprimés ont une volonté incroyable, poursuit le Dr Cungi, ils essaient à tout prix de tenir le coup, de rester vivants. Ils ont tout essayé et sont souvent épuisés».


14. Peut-on prévenir la dépression ?

Oui. Lorsque, dans sa propre famille, on a connaissance de personnes qui ont été ou sont dépressives, il faut se méfier. Au même titre que pour une autre maladie, diabète, hypertension, etc. «Il faut aussi accorder de l'attention à la manière dont on règle les problèmes rencontrés dans sa vie courante - par exemple face à des situations qui génèrent de l'angoisse, du stress. Arrêter de gérer en force les obstacles et de mettre la volonté toujours en avant. Car à ce rythme, on s'épuise sur le long terme. D'où l'importance aussi d'acquérir des techniques pour savoir gérer son stress. Sans oublier des règles simples d'hygiène de vie, détaille le Dr Cungi, comme continuer à manger régulièrement, dormir...»


15. Pour ou contre la nouvelle campagne d'information nationale ?

Lancée en France en octobre 2007 par l'Inpes, cette campagne de sensibilisation repose sur des spots d'info radio et télé et un guide intitulé la Dépression, en savoir plus pour en sortir. Mais son succès public (250 000 guides commandés...) n'est pas applaudi par tous. Les critiques dénoncent une surmédicalisation à outrance de la dépression, un amalgame entre état dépressif grave et troubles mineurs, craignent une hausse des prescriptions d'antidépresseurs, soulignent l'impasse totale sur la prise en charge de type psychanalytique... Pour l'Association fédérative française des organismes de psychothérapie et de psychanalyse (Affop) (1), le sens existentiel du symptôme se retrouve ainsi escamoté. «Cette campagne me semble en effet déprimante, réagit le Dr Francis Paumier, psychiatre et psychothérapeute à Nantes. Cette conception de plus en plus maladive de la dépression est préoccupante car il devient anormal d'avoir une réaction dépressive à un événement de la vie. Je vois plutôt la dépression comme une conséquence de l'échec d'autre chose.» Son de cloche un peu différent avec le Pr Henri Loo : «Il faut rester médecin et non pas idéologue, ne pas se perdre dans un combat d'arrière-garde et ne pas méconnaître l'efficacité des traitements. Quant aux psychothérapies, elles sont toujours essentielles, et ce quelle que soit leur inspiration.» De son côté, Stéphanie Wooley, responsable de l'association France Dépression, réagit aussi aux critiques : «Le guide a demandé trois ans de travail durant lesquels tous les points de vue, y compris ceux des psychanalystes, ont été entendus. Cette campagne est une vraie première, la France rattrapant ainsi son retard dans la sensibilisation aux problèmes psychiques.»


(1) Le Diagnostic and Statistical Manual (version IV) West publié depuis 1994 par l'Association américaine de psychiatrie pour définir de plus en plus précisément ce qui était globalement regroupé auparavant sous le terme de «troubles mentaux».



Sylvie Riou-Milliot

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